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Entretien avec l’abbé Renaud de Sainte Marie : Y a-t-il une supercherie du Genre ?

Ce nouveau siècle déborde d’idéologies, entre le néo-féminisme, l’indigénisme et la théorie du Genre. Ces trois nouveaux mouvements, qui nous sont venus des États-Unis, prétendent se battre à l’intersectionnalité des luttes, en refusant tout débat contradictoire. À propos du Genre, toute critique sera immédiatement condamnée par les militants LGBT, fascisée par l’opinion médiatique, et extrême-droitisée. Cette impossibilité de penser l’idéologie du Genre, en-dehors des thèses autorisées, n’a pas empêché pourtant certains intellectuels de prendre la plume, pour dénoncer une mascarade, voire une escroquerie que l’on impose dans l’espace public comme si désormais le Genre était une évidence pour tout le monde. Cette idéologie, dont on perçoit déjà les abus et les excès, a été analysée dans un petit ouvrage, qui se présente déjà comme un rappel à l’ordre, celui de l’abbé Renaud de Sainte Marie, prêtre et philosophe, qui a publié La supercherie du Genre (Via Romana, 2022). J’ai demandé à le rencontrer pour lui poser quelques questions afin de comprendre ce phénomène de société. Cet entretien est paru dans le site du mensuel Entreprendre et dans la livraison n°41 de Livr'arbitres Il est désormais en accès libre dans l'Ouvroir.

 

La Cause Trans
(1ère partie)

La-supercherie-du-Genre.jpegMarc Alpozzo : Vous êtes prêtre, et titulaire d’un doctorat de philosophie, vous avez été ordonné en 2006, et vous êtes l’auteur de deux ouvrages, La sensibilité dans la vie morale (Clovis, 2009) et Le désir du Bien (Téqui, 2021). Vous venez de publier un livre assez court, La supercherie du Genre (Via Romana, 2022) mais essentiel, puisque vous êtes une des rares voix, à ma connaissance, à oser dénoncer ce nouveau mouvement fondé sur ce que l’on appelle en France la « Théorie du Genre » (Gender studies) qui nous vient des États-Unis, et qui est en très grande partie une imposture sociale, une escroquerie qui met directement en danger nos enfants. Pourquoi avez-vous décidé d’écrire et de publier cet ouvrage, qui ne se présente pas comme un pamphlet, mais un cri d’alarme, un cri du cœur ?

 

Renaud de Sainte Marie : Il existe une littérature abondante pour alerter ou donner des réponses à tel ou tel point particulier des « études de Genre », comme par exemple sur la question de la transidentité et des opérations de transition. En fait, depuis le milieu des années 90 ces questions ont commencé d’être abordées en dehors du cercle étroit des milieux universitaires, comme à la Conférence de Pékin en 1995, quatrième conférence de l’ONU sur les femmes. L’originalité de mon ouvrage repose en fait sur le plan large qu’il adopte. J’ai voulu remettre cette affaire dans la perspective d’une réflexion philosophique pour faire voir ce vers quoi ce courant agressif nous amène. Je n’accuserai pas les seules Etats-Unis d’être le laboratoire de ces idées mortifères, car beaucoup de ces idées viennent aussi de France, en particulier du courant des féministes matérialistes. Le résultat concret de cette fermentation intellectuelle, qui a débordé depuis longtemps les cercles féministes, est la mise en place de politiques volontaristes. Celles-ci vont de plus en plus contraindre la société à accepter de gré ou de force les évolutions, quitte à « éduquer » dès le plus jeune âge pour faire accepter toutes les innovations en terme de définition de genre, de recomposition indéfinie de la famille. J’observe depuis une dizaine d’années les choses s’accélérer, j’avais l’intention depuis longtemps d’écrire sur ce sujet et j’accumulais des matériaux dans ce but. Plusieurs facteurs m’avaient jusqu’alors retenu de mettre ce projet à exécution : il fallait que j’achève ma thèse que je travaillais en parallèle de mon ministère pastoral, les idées elles-mêmes demandaient à s’affiner pour que je puisse prétendre à produire un ouvrage qui s’élève au-dessus de tel ou tel point particulier, il manquait aussi une occasion qui me donne une motivation à descendre dans l’arène. L’impulsion, ce sont des partisans de ces théories qui me l’ont donnée. L’année dernière est sorti le rapport sur les abus sexuels dans l’Eglise produit par la CIASE. Cette commission indépendante n’était pour autant pas très neutre. En lisant l’une des annexes du rapport, en l’espèce le travail de l’INSERM qui produisait l’évaluation chiffrée dont les médias ont fait des gorges chaudes, j’avais constaté avec effarement le biais idéologique hostile qui guidait l’étude. Je retrouvais alors des concepts et des noms connus. Quand, dès les premières pages, vous lisez que le système patriarcal réifie les femmes et les enfants, vous avez là une manifestation caractéristique de cette idéologie. Le sujet du rapport est une matière douloureuse, qui touche le cœur du prêtre que je suis, mais je ne supporte pas qu’on profite de la souffrance des victimes pour faire passer subrepticement de contestables clefs interprétatives. Celles-ci sont tout sauf pertinentes pour comprendre les mécanismes des comportements pervers et y porter remède. Partout ces idées sophistiques s’immiscent et conditionnent les esprits. Bien sûr, elles n’apporteront pas de solutions aux problèmes réels ou imaginaires dont elles s’emparent, mais très certainement elles en créeront de nouveaux, et de graves.

 

M. A. : Vous n’êtes pas tendre avec le Genre. Parce que le mot « gender » s’est généralisé, et qui fait désormais référence aux différences sociales et culturelles plutôt qu'aux différences biologiques, afin de désigner une gamme d'identités qui ne correspondent pas aux idées établies du masculin et du féminin, vous parlez, vous, plutôt de « métagénisme ». Alors, bien sûr, vous l’avez fondé contre l’anglicisme, mais aussi parce que cela vient du grec méta (au-dessus) et du latin generis (genre). Ce choix de mot semble être plutôt méthodologique, car il veut dénoncer non pas la transition d’un genre à l’autre, mais le dépassement de la seule question du genre pour englober toutes les luttes à l’intersectionnalité. En quoi est-ce pour vous un danger pour la cohérence de notre société, mais aussi pour la pérennité de l’être humain ?

 

S. M. : En fait, les pensées sur le Genre qui sont d’abord portées par les différents courants du féminisme ont dénoncé d’abord le fameux patriarcat, le pouvoir des hommes sur les épouses, puis c’est le patriarcat blanc qui a été désigné à la vindicte, dans une perspective de convergence des luttes. Toutes ces revendications sont purement politiques, entendez que les tenants de ces idées ne nient pas la réalité des différences biologiques, ils refusent à ces dernières une signification politique. Le problème pour eux vient du fait qu’il existe des inégalités et qu’il faut les abolir. Pour éviter d’utiliser le terme « genre » qui connote trop les questions de définition des orientations et des identités sexuelles, j’ai dû en inventer un. Comme les catégories par lesquelles nous classons les gens selon leur sexe ou leur identité raciale doivent être dépassées, il m’est apparu que le néologisme de « métagénisme » les regroupait heureusement sans trahir conceptuellement les combats politiques de ces gens. Par ailleurs je m’oppose effectivement avec véhémence au métagénisme. Il y a plusieurs critiques à leur faire.

Premièrement, il me semble que confondre les luttes en désignant un ennemi commun, masque leurs fortes disparités et empêche de trouver des solutions spécifiques aux problèmes qui dans certains domaines existent réellement.

Ensuite, je suis las d’attendre la naissance d’une société idéale où liberté et égalité seront enfin atteintes, c’est un idéal qui nous est resservi sans cesse mais le plat commence à être froid. Je croyais naïvement que nous étions déjà en démocratie. D’ailleurs, je ne vois pas comment ces matérialistes (au sens du philosophique du terme) que sont les métagénistes, je ne vois pas comment ils justifient que leur doctrine implique et la liberté et l’égalité comme biens politiques. Liberté et égalité peuvent se comprendre dans une perspective spiritualiste, mais je ne vois pas comment ils peuvent l’insérer dans leur pensée sans pétition de principe. Je pense qu’aujourd’hui ces grandes idées masquent un cynisme politique terrible.

Enfin, le matérialisme héraclitéen qui a été réintroduit dans la pensée occidentale depuis Hegel et Marx, met au principe de toutes choses un devenir perpétuel, ce qui implique un perpétuel conflit dans les choses. Le métagénisme s’inscrit peu ou prou dans une filiation marxiste non orthodoxe. C’est là que se situe à mon avis le vice le plus dangereux de cette pensée, d’autant plus dangereux qu’il n’apparaît pas aux yeux de bien des tenants de ces doctrines. Dès lors, on comprend assez facilement le danger que court une société qui est menacée d’une perpétuelle instabilité, ce qui n’est jamais bon en termes de maintien et de progrès de la civilisation.

 

M. A. : Les militants trans dénoncent l’assignation biologique, comme une sorte d’assignation sociale, accusant le sexe d’être une pure construction sociale. C’est une sorte de matérialisme qui refuse catégoriquement l’essentialisme et surtout toute nature comme finalité. Est-ce qu’on ne peut pas parler là d’une fin de l’homme ? Ces métagénistes, comme vous les nommez, ne sont-ils pas d’une certaine manière des eugénistes ?

 

S. M. : Eugéniste me semble un mot trop faible et inadapté pour désigner le mal que je dénonce. J’accuse les métagénistes d’être humanicides, de tuer une part de l’humanité dans les gens qu’ils veulent libérer. Et ce qui est paradoxal pour des matérialistes, c’est le corps qui fait les frais de leur révolte. En effet, notre humanité n’est pas une liberté absolue, elle est contingentée par ce que nous sommes nativement. Nous avons un corps sexué, ou plutôt nous sommes aussi un corps sexué. Depuis le slogan des féministes pro-avortements, « Mon corps m’appartient » nous nous sommes habitués à faire de nos corps des biens meubles dont on dispose à l’envi. Le sujet humain n’est désormais plus tout à fait son corps, il est en outre sorti de la nature pour fonder la société politique, seul il détermine des fins dans un monde qui n’en a aucune. Il lui est donc loisible de transformer la nature selon son bon plaisir (même si nous sommes revenus de cette illusion de toute-puissance) et le médium qui le relie à la nature, son corps, n’échappe pas à ce remodelage. Ainsi, cette pensée postule que seule la volonté de l’humanité constituée en corps social est capable d’assigner des fins, mais c’est nier l’évidence des dynamismes à l’œuvre dans le cosmos et ceux qui sont inhérents à notre humanité. L’inquiétude écologique nous a mis en garde contre l’illusion de manipuler indéfiniment notre environnement, et c’est une bonne chose, parce qu’elle nous rappelle à l’ordre. Pourquoi le respect du vivant dans sa globalité présentée comme nécessaire pour le bien de l’humanité exclurait-il le corps vivant de l’homme ? Certes, affirmer l’existence de finalités au sein de la nature et même de la biologie humaine limite la liberté, contraint notre agir. Mais nous ne serons pas plus malheureux pour cela, et très certainement pas moins libre. Si au nom de son libre-arbitre l’homme se détruit, quel avantage une telle liberté nous offre-t-elle ?

 

M. A. : Pour les militants trans, « les fonctions sociales attribuées aux genres masquent une domination spécifique », écrivez-vous. On a vu que la question de la transidentité est à la convergence des autres luttes, néoféminisme et indigénisme. Or, ce genre de revendications est fondé sur la lutte contre la domination masculine, que l’on considère possible par le biais économique et la disqualification de la parole de la femme. Pourquoi peut-on finalement parler ici de supercherie, lorsque ces militants disent que ce sont essentiellement les codes masculins (au sens de leur terminologie, les codes masculins cis) qui gouvernent la société, et en quoi est-ce illégitime de dire que l’on doit déconstruire le patriarcat blanc et l’hétérosexualité pour en finir avec la domination ?

 

S. M. : Sans l’initiation intellectuelle proposée par le métagénisme, nous serions, selon ses défenseurs, susceptibles de confondre le racisme systémique, sur lequel notre société est paraît-il bâtie, avec d’autres phénomènes comme par exemple la violence contre les blancs de la part de personnes de couleur. Si le racisme systémique (contre les femmes, les minorités sexuelles, les minorités de couleurs et les minorités religieuses) est le mal absolu dont nos amis métagénistes ont juré d’avoir la peau, la haine du mâle blanc passe par pertes et profits, quand elle n’est pas vue comme une catharsis nécessaire à l’injustice qui est censée oppresser les minorités. Il y a ici au moins deux malhonnêtetés intellectuelles.

D’une part, elle assigne une partie non négligeable de la population des sociétés occidentales à une malice native. L’homme blanc a tort d’être né et de pérenniser ses privilèges, ce qu’il fait en n’acceptant pas de se remettre en cause. L’expérience prouve que ceux qui consentent à entrer dans ce petit jeu pervers sont l’objet d’un sadisme et d’une humiliation sans fin, la moindre parole et le moindre geste pouvant être interprété contre eux. J’ai vu les images de ce qui était arrivé à l’Université d’Evergreen dans l’Etat de Washington en 2017. On assiste à des scènes ahurissantes de défoulement collectif sur des professeurs dont le seul tort est d’être né de la mauvaise couleur de peau (car même les femmes blanches finissent par être ciblées). Certains consentent à se soumettre et pourtant ils sont toujours suspects auprès des groupes supposés être en danger. Inconsciemment ou non, beaucoup comprennent dans quel camp se placer pour être du côté des dominateurs de fait, ou pour éviter tout simplement la persécution. Si on n’a pas la chance de ne pas être né blanc (on en est là !), il faut se ranger dans une autre catégorie comme l’une des milliers d’identités de genre qui existent désormais. Être blanc cis et hétérosexuel devient vraiment inconfortable socialement. Mais je ne suis pas sûr que cela suffise à terme à satisfaire les militants des minorités. Plus récemment une femme noire, professeur à l’Université de Rutgers, Brittney Cooper a déclaré : « La blancheur va avoir une date de fin. […] Nous devons éliminer ces c… [motherf…] »

Ces douces paroles nous amènent à la deuxième escroquerie intellectuelle, celle qui nous assure que la convergence va donner naissance à la justice dans notre société. Car la convergence des luttes amènera à une conflictualité des minorités. J’ai personnellement du mal à concevoir comment les musulmans peuvent avoir un projet de société commun avec les diverses composantes du mouvement LGBT. Mais pour l’instant nous sommes encore dans le moment de convergence contre l’ennemi principal, le patriarcat blanc. Ce soi-disant patriarcat a disparu depuis longtemps. Il offre cependant un bouc émissaire facile à des gens qui se sentent la nécessité de se battre pour une cause juste ; c’est une cible d’autant plus facile à abattre qu’elle est morte, elle ne risque donc pas de se défendre. Pendant ce temps un nouveau règne s’installe, et sa règle sera faite de l’acier le plus froid.

 

M. A. : Votre ouvrage est moins une analyse, qu’une tentative de préconisation pour nous sauver, non seulement de la supercherie du Genre, mais du péril du Genre. On a vu les « transitionneurs » se multiplier de manière exponentielle ces dernières années, mais on essaie aussi de passer sous silence, que les « détransitionneurs » sont depuis quelques années extrêmement nombreux, avec parfois des procès faits aux parents qui ont laissé des enfants qui n’étaient pas encore en âge de se déterminer par eux-mêmes, changer de sexe sur un simple caprice[1]. Que préconisez-vous aux parents d’aujourd’hui et de demain, qui ont un enfant trans, de moins de dix-huit ans, et qui les presse de l’inscrire à une hormonothérapie, voire une mammectomie pour les FtoM (Female to Male) ? Les pouvoirs publics en France n’ont pas encore pris la mesure de l’urgence à cesser cette hémorragie, y voyez-vous comme un aveuglement ?

 

S. M. : Il faudra nous expliquer comment on peut prétendre présenter les mutilations organiques et hormonales comme des manifestations du progrès. Parce que même les traitements hormonaux n’existent que pour contrarier le développement induit par notre spécificité génétique X ou Y. Pour ce qui est des parents qui ont incité leurs enfants à de telles opérations, certains devraient se poser des questions sur eux-mêmes et sur leur rapport à la progéniture, j’aimerais savoir ce que disent des psychanalystes honnêtes sur ces parents qui se réjouissent que leur petit garçon se fasse passer pour une fille, sur ce que cette joie révèle de leur psyché. Je n’ai pas une vision très précise sur l’étendue du phénomène de transition durant l’enfance, mais à n’en pas douter il y a aussi le signe d’une démission de l’autorité parentale. Pour prévenir, il faudrait que les parents contrôlent l’accès aux contenus multimédias de leurs enfants, car il y a une propagande inimaginable sur les réseaux sociaux et les médias en faveur de cette culture de la transition. Etre d’une communauté de genre alternative est très tendance. Vous conviendrez que comprendre la malice qui se cache derrière demande un recul que l’adolescent possède rarement, et c’est pour cela que les adultes doivent exercer leur autorité, ils sont censément plus sages que le jeune en transition vers le monde adulte. Quant à ceux des parents qui voient leurs enfants leur demander ces « thérapies » de transition, ils doivent être catégoriques. Rien ne doit pouvoir les convaincre qu’autoriser une pareille mutilation est pour le bien de leurs enfants. Le langage qu’ils peuvent avoir auprès de leurs enfants est le suivant : « Quand tu es né, je n’ai choisi aucune de tes caractéristiques personnelles, ni ton sexe, ni ta psychologie, ni tes qualités, ni tes défauts. Je ne suis pas maître de ta vie, aussi je refuse de toucher à ce que tu es. En conséquence, je refuse absolument que des étrangers qui ne t’ont ni nourri, ni protégé, ni éduqué puissent bouleverser cette intimité qui est une partie de toi. » Il faut que les parents expliquent à leurs enfants que changer son corps, ce n’est pas comme changer de vêtement et qu’en tant que parents ils ne peuvent, qu’ils ne pourront jamais accepter cela. Quant aux pouvoirs publics ils paraissent tellement acquis à l’idéologie que j’attaque qu’il me semble qu’il ne faut pas s’attendre à trouver auprès d’eux une oreille bienveillante. J’aimerais avoir une vision plus positive mais il faut être conscient que refuser concrètement cette idéologie demande un certain courage. Nous n’avons pas seulement affaire à une poignée d’idéologues excités, mais à des pouvoirs médiatiques et politiques acquis à cette cause.

 

 

M. A. : Votre ouvrage pose quelques principes de base, qui me semblent essentiels, pour assurer un futur meilleur pour nos enfants : une reconnaissance de la nature comme finalité, un rapport harmonieux entre l’esprit et le corps en cessant toutes les oppositions permanentes, la liberté comme équilibre de la vie humaine et non comme idée absolue, la famille comme rempart au meilleur des mondes, celui des métagénistes qui sont moins des hommes de passage que des êtres de transition, et un retour à l’humain, contre le post-humain si j’ose dire. Finalement, contre ce progressisme moral échevelé, on peut dire que votre texte est une sorte de conservatisme rationnel et mesuré, n’est-ce pas ?

 

S. M. : Plutôt que de ranger mon texte sous l’étiquette du conservatisme, je préfère parler d’un manifeste de la sagesse pérenne qui a forgé notre civilisation dans ce qu’elle a de meilleur. Il faut bien avoir conscience que j’ai parlé en restreignant ma parole. Ce que je défends dans mon texte est, d’après l’idéal qui m’anime, nécessaire mais il reste incomplet. Mon action pastorale vise à un but plus élevé que ce que ces principes de base tentent de décrire. Mais mon agir ne peut pas opérer si l’équilibre naturel que je présente succinctement dans la deuxième partie de mon livre est déstabilisé ou nié. J’ai bien conscience que cette proposition d’un continuum entre la nature de l’homme et sa vie politique n’est pas évident pour notre génération. Nous avons en effet été influencés par notre époque et l’héritage de la pensée contractualiste. Il existe bien des variantes du contractualisme, mais il faut reconnaître que ces pensées instaurent une dialectique entre la nature de l’homme et sa vie en société. C’est dans une perspective plus pacifiée entre la nature et la politique que je fais une proposition à ceux qui veulent me lire avec bienveillance.

 

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Avec l'abbé Renaud de Sainte Marie

 

 En couverture : Camille Cabral, transexuelle d'origine brésilienne, élue conseillère du XVIIe arrondissement de Paris en mars 2001, défile lors d'une manifestation de transexuels, le 04 octobre 2003 dans les rues de Paris. afp.com/FRANCOIS GUILLOT

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[1]          Voir à ce propos mon article : « Transidentité : ils ont changé de sexe et veulent faire marche arrière » dans le site du mensuel Entreprendre, 24 septembre 2022.

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