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Raymond Abellio, mystique contemporain

Ce portrait de Raymond Abellio m'a été commandé par Livr'arbitres pour son numéro 46 qui comportait un dossier spécial consacré à l'écrivain.

Georges Soulès, de son vrai nom (1907-1986) Raymond Abellio, est d’abord ingénieur, avant d’être écrivain. Certes, s’il a aujourd’hui sombré dans l’oubli, ou presque, et très injustement, il est très certainement un écrivain majeur que l’on se doit de redécouvrir. Mais probablement n’était-il pas homme de son temps. Auteur d’une vingtaine d’ouvrages, dont Vers un nouveau prophétisme[1], La Structure absolue[2], ou encore Les yeux d'Ézéchiel sont ouverts[3], La Fosse de Babel[4], on peut considérer Abellio comme un écrivain gnostique, dont le grand œuvre, La Structure absolue, était une réponse à Sartre et à son livre L’Être et le Néant (1943). Or, c’était d’autant plus une querelle philosophique des temps modernes, que Sartre pensait que la conscience était vide, n’étant ni une faculté ni une propriété ni même un contenant mais une relation à, une intentionnalité. « La conscience, nous disait-il, est conscience positionnelle du monde. » C’est alors, que là où Sartre et son époque mettaient l’accent sur le néant, Abellio conciliait phénoménologie et gnose, science et ésotérisme, et refusait de croire en un homme qui se fabrique une identité dans l’action et dans ce qu’il fait, mais plutôt en un homme intérieur, un éveil à soi dans ce qu’il appela la structure absolue.

 

Militant socialiste dans sa jeunesse, lorsqu’il s’appelait encore Georges Soulès, il devint un intellectuel métaphysicien qui aspirait à une Europe spirituelle, ce qui ne peut évidemment pas nous déplaire. C’est alors qu’il publie Vers un nouveau prophétisme qu’il change aussi de nom, passant de la politique à la phénoménologie, et entamant une œuvre marquée par une seule obsession, celle de la conversion transfigurante, préparant ainsi une révolution intellectuelle dont il lui semblait qu’Edmond Husserl avait largement posé les bases. Le fondement de son discours cependant est une terminologie théologique judéo-chrétienne d’inspiration ésotérique, ce qui en fait un auteur hermétique, un mystique moderne que l’on ne peut lire qu’à partir de sa Structure absolue.

 

Si d’aventure l’on s’intéresse à l’œuvre d’Abellio, on ne pourra l’aborder qu’en considérant qu’il batailla sans relâche pour mettre l’homme au centre du monde, et que tout l’objet de sa recherche était de réconcilier l’humain et l’universel, mais en se donnant pour but de construire une nouvelle structure de la conscience. Là aura été la grande obsession de toute sa vie. Son grand œuvre aura paru en 1965, et, jusqu’à sa mort, en 1986, à Nice, il n’aura eu de cesse de revenir à sa structure absolue, pour en vérifier la pertinence et le bon fonctionnement. C’est donc à partir de cet essai, que l’on pourra lire ses autres œuvres, notamment ses romans, que sont encore disponibles chez Gallimard, ce qui n’est malheureusement pas le cas, de son essai majeur. Et par ce texte, je me permets d’encourager son éditeur à le rééditer.

 

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[1] Essai, Paris, Gallimard, 1947, 1950, 1963.

[2] Essai, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des idées », 1965.

[3] Roman, Paris, Gallimard, 1948.

[4] Roman, Paris, Gallimard, 1962.

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